Handicap : quel est le rôle des élus CSE et que doivent comporter les négociations obligatoires sur le sujet ?

Publié le 19/08/2022

De plus en plus de travailleurs se trouvent confrontés à des problèmes de santé ou de diminution de leurs capacités physiques, parfois même intellectuelles. L’allongement de la vie professionnelle, l’intensification du travail, des nouveaux modes de management, les mutations et les nouvelles technologies amplifient les risques professionnels. On estime qu’une personne sur deux sera confrontée au cours de sa vie à une situation de handicap ou à une maladie invalidante.

Dans les entreprises de plus de 50 salariés, le Comité social et économique (CSE) est informé et consulté sur les questions intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise, notamment sur les mesures prises en vue de faciliter l’accès et le maintien dans l’emploi des accidentés du travail, des invalides civils et militaires, des personnes atteintes de maladies chroniques évolutives et des travailleurs handicapés, tout particulièrement sur l'aménagement des postes de travail.

Quelle que soit la taille de l’entreprise, chaque année l’employeur doit déclarer le nombre de salariés reconnus travailleurs handicapés (DOETH). Cette déclaration fait partie de la déclaration sociale nominative (DSN). Elle doit être soumise aux Représentants du personnel (RP) lors d’une réunion spécifique (Article D.5212-9 du Code du travail). Elle permet de vérifier si l’obligation légale d’embauche de travailleurs handicapés est remplie, et dans le cas contraire, quelles sont les contreparties.

Le CSE est consulté sur les possibilité de reclassement du salarié déclaré inapte par le médecin du travail et les élus peuvent conseiller un salarié sur les démarches complexes lorsqu’il y a un risque d’inaptitude.

Toutefois, le droit des personnes en situation de handicap au travail doit être défendu quel que soit le sujet traité et le type de négociation. Á titre d’exemple, lorsque le CSE rend un avis sur le plan de développement des compétences, les élus demandent les adaptations nécessaires pour que toutes ces personnes aient un accès équitable aux formations proposées. Ils vérifient par la suite que les engagements de l’employeur ont été tenus.

Enfin, les négociateurs doivent être vigilants sur 2 points lorsque s’ouvre la négociation d’un accord de méthode sur les négociations obligatoires (L2242-11 du Code du travail) :

  • Un accord de méthode peut modifier la périodicité de la négociation EP-QVCT à 4 ans au lieu de 3 ans ;
  • Un accord de méthode peut modifier le contenu de la négociation EP-QVCT voire supprimer le thème relatif aux personnes en situation de handicap et le rapport que doit remettre l’employeur.

Le handicap est un sujet transversal qui touche tous les domaines de l’entreprise ou de l’administration.

En pratique

Structurer une section syndicale autour de la thématique du handicap est essentielle.

Pour répondre au défi du handicap et aux demandes des salariés, la section syndicale doit s'organiser et monter en compétence. La première étape consiste, si cela n’a pas été fait, à structurer la section et définir les tâches de chacun. Il est souhaitable qu’un ou deux militants se chargent spécifiquement du handicap et face le lien avec la santé au travail, la qualité de vie au travail et la prévention des risques professionnels. Il leur faut également prendre en compte les temps et modalités de transport domicile-travail des personnes handicapées. Pour cela, ils peuvent être accompagnés par Action logement et l’Agefiph (dans le privé) ou le Fiphfp (dans le public).

Pour permettre aux militants d’acquérir de nouvelles compétences, les Fédérations et les Union régionales interprofessionnelles (URI) organisent des sessions de formation sur le handicap.

La Confédération a conçu un parcours de formation (en 2007, mis à jour en 2014) que les URI déclinent et mettent à jour également en fonction des nouveaux dispositifs.

Par exemple, au sein de l’URI Grand Est, le déroulé de formation de la Confédération est utilisé, tout en étant remis à jour et scindé en 2 parties :

  • d’abord 2 jours de formation sur : - la sensibilisation et la connaissance des textes pour être en capacité d'agir dans un établissement - faire une campagne de sensibilisation ou répondre à une sollicitation individuelle;
  • puis 3 jours de formation : signer un accord, travailler en mode projet, etc.

Au sein de l’organisme de formation de l’URI Ile de France, l’Irefe, il existe :

  • des séquences dans les formations de base CSE et CSSCT;
  • une formation spécifique de 3 jours sur l’Insertion et le maintien dans l’emploi des travailleurs en situation de handicap;
  • par ailleurs, le sujet handicap est également évoqué dans les formations Lutte contre les discriminations et Qualité de vie au travail.

Renseignez-vous auprès de votre Union régionale pour en savoir plus.

Les militants qui accueillent les travailleurs dans les permanences, et/ou qui vont à leur rencontre dans les services, doivent être en mesure d’apporter des réponses dans un délai raisonnable. Pour cela, ils doivent, par l’intermédiaire de leur syndicat, échanger avec les structures CFDT de proximité qui offrent des services dans ce domaine (selon les Régions : Permanence accident du travail/ maladie professionnelle, Chargé de mission handicap, Responsable santé au travail) et ils doivent pouvoir entrer en contact avec les principaux acteurs en local (Médecine du travail, MDPH, CAP Emploi).

Par ailleurs, l’utilisation d’une enquête flash sur l’insertion et le maintien dans l’emploi des personnes handicapées est recommandée. En effet, l’enquête flash est un outil à destination des sections syndicales d’entreprises et d’administrations pour recueillir le ressenti des salariés ou agents sur la situation dans leur lieu de travail, et pour établir un diagnostic syndical. Proposée sous forme de questionnaire, cette enquête est diffusable aux salariés ou agents en version papier ou électronique. Cela leur permet de s’exprimer de manière strictement confidentielle et anonyme, et fournit à la section des résultats concrets et exploitables.

Il appartient à la section syndicale, en lien avec son syndicat, de choisir les thématiques susceptibles de favoriser la syndicalisation. Le maintien en emploi d’une partie de la population usée par le travail, avec un risque d’inaptitude ou de handicap, est une préoccupation grandissante qui peut être au centre d’une campagne de développement ou une revendication forte lors d’une élection professionnelle.

 

Questions/Réponses

🔶 Comment préparer une négociation ?

La négociation se prépare comme à chaque fois par une consultation des travailleurs concernés et de la section syndicale, complétée si besoin par un état des lieux. Le syndicat doit être informé dès qu’une négociation est annoncée et le sujet peut être abordé lors d’un conseil syndical. Le médecin du travail, sans aborder les cas individuels, peut apporter un éclairage sur les risques pour la santé et suggérer quelques préconisations. Des sites internet dédiés et reconnus (celui de l’AGEFIPH pour le privé et celui du FIPHFP pour la fonction publique) fournissent une information réactualisée. Enfin, il ne faut pas oublier tous les sites CFDT, des Fédérations, des Unions Régionales ou de la Confédération, qui ont généralement des pages conçues pour accompagner les militants.

🔶 De quoi ai-je besoin pour mener une négociation ou donner un avis en CSE ?

Pour la consultation du CSE, sur la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi, l’employeur met à disposition des membres du CSE des informations dans une base de données économiques, sociales et environnementales (BDESE).

Dans les entreprises entre 50 et 300 salariés, la BDESE doit contenir entre autres des informations sur l’évolution de l’emploi, des qualifications, de la formation, des salaires et sur les actions en faveur des travailleurs handicapés (Articles L2312-26 et R2312-8).

Dans les entreprises de 300 salariés et plus, la BDES doit contenir aussi des données chiffrées : nombre de travailleurs handicapés, de travailleurs handicapés suite à un accident de travail dans l’entreprise, de salariés déclarés inaptes, de salariés reclassés... (Article R2312-9).

En l'absence de BDESE, l'employeur est passible d'une amende de 7500 € pour délit d’entrave.

Avec la Déclaration Obligatoire d’Emploi des Travailleurs Handicapés (DOETH), ces données sont essentielles pour le travail d’analyse et l’élaboration de propositions et de revendications CFDT.

Par ailleurs, les militants d’entreprise ou d’établissement peuvent utiliser un outil intéressant pour recueillir l’avis des adhérents et des salariés ou agents, et les transformer ensuite en revendications à porter : l’enquête flash. En effet, c’est est un outil à destination des sections syndicales d’entreprises et d’administrations pour recueillir le ressenti des salariés ou agents sur la situation dans leur lieu de travail et établir un diagnostic syndical. Pour monter une enquête flash, il faut impérativement se rapprocher de son Union régionale ou de sa Fédération.

🔶 Que peut-on négocier lors de la Négociations sur les salaires ?

Lors des Négociations Obligatoires sur la rémunération, le temps de travail et le partage de la valeur ajoutée les négociateurs CFDT doivent être attentifs à ce que les personnes handicapées, avec ou sans reconnaissance administrative, bénéficient autant que les autres salariés des avancements individuels ou des primes. Une attention toute particulière sera portée sur les demandes de temps partiels.

🔶 Et lors des autres négociations ?

La négociation obligatoire sur l’égalité professionnelle femmes/hommes et la qualité de vie et des conditions de travail (EP-QVCT) concerne de nombreux sujets dont "les mesures relatives à l'insertion professionnelle et au maintien dans l'emploi des travailleurs handicapés, notamment les conditions d'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, les conditions de travail et d'emploi et les actions de sensibilisation de l'ensemble du personnel au handicap" (Art. L.2242-17 du Code du travail, dispositions supplétives).

La négociation sur l'insertion professionnelle et le maintien dans l'emploi des travailleurs handicapés se déroule sur la base d'un rapport établi par l'employeur présentant la situation par rapport à l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés.

Dans cette négociation, l’organisation du télétravail pour des travailleurs handicapés doit être abordée avec vigilance. Cette solution, préconisée parfois par le médecin du travail en cas d’inaptitude partielle, comporte des risques d’isolement, de surcharge de travail, de perte de frontière entre l’activité professionnelle et la vie privée.

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