Covid-19 : le point (Le Travailleur N°150 / Mars 2021)

Publié le 08/03/2021 (mis à jour le 08/07/2021)

La pandémie de Covid-19 continue de faire des ravages et les connaissances à son sujet sont en perpétuelle évolution, nécessitant de faire le point 6 mois après la parution de l’article  en septembre 2020 (n°148) auquel le lecteur pourra se reporter.
Le lecteur pourra également se reporter à l’article paru en décembre 2020 (n°149) concernant les maladies infectieuses en milieu professionnel.

On emploie le masculin « le Covid-19 » lorsqu’il s’agit du virus et le féminin « la Covid-19 » lorsqu’il s’agit de l’infection provoquée par le virus.

Comprendre le fonctionnement du virus

Chaque cellule du corps humain se caractérise par la faculté à fabriquer des protéines liées spécifiquement à la fonction que la cellule exerce. L’information nécessaire à cette fabrication se situe en certains endroits de la molécule d’ADN contenue dans le noyau, appelés gènes.

L’ensemble des gènes, au nombre de 25 000, constitue le programme génétique de l’individu. Ils utilisent un langage particulier avec la combinaison de 4 « lettres » qui aboutie à 2 milliards de signes.
Pour transférer l’information de la molécule d’ADN aux chaînes de montage des protéines, qui sont un assemblage d’acides aminés, intervient une molécule presque identique à l’ADN, l’ARN messager.

Les virus sont des entités simples constituées d’une molécule d’ADN ou d’ARN.
Ils infestent les cellules humaines (mais aussi toutes les espèces animales ou végétales) et détournent à leur profit la machinerie des cellules pour se multiplier, car ils en sont incapables par eux-mêmes.

Le Covid-19 ou SARS-CoV-2 est un virus à ARN constitué d’environ 10 000 signes avec l’existence de 20 gènes.

La molécule d’ARN est enfermée dans une coque de nature protéique, le tout étant entourée d’une enveloppe faite de graisses. A la surface de cette enveloppe se situe une structure appelée protéine « spike », en de multiples exemplaires, formant une couronne visible au microscope électronique, et ayant donné lieu au terme de coronavirus.

Cette protéine « spike » ou « protéine S » va permettre au virus de s’attacher aux cellules humaines, notamment au niveau du poumon, puis de pénétrer à l’intérieur.
Le processus de multiplication du virus dans la cellule passe par le stade de copie de la molécule d’ARN avec le risque d’erreurs de copie modifiant le programme génétique du virus. On parle de mutations.
Plus le virus circule, plus il se multiplie, avec le risque de voir apparaître des virus différents de la souche de base. On parle de variants.

Les virus mutent régulièrement, mais ces mutations ne sont déterminantes que si elles affectent des zones sensibles du programme génétique de ces derniers.
Concernant le Covid-19, les mutations les plus significatives concernent le gène de la protéine S, la modification de cette protéine entraînant une plus grande contagiosité, avantage permettant au variant de supplanter la souche d’origine. C’est ce qui se produit avec les variants anglais, sud-africain, brésilien. Si le virus continue à circuler, d’autres variants vont apparaître avec le risque d’un variant plus dangereux, ce qui ne semble pas pour le moment le cas pour les différents variants identifiés.

Quelques précisions sur la maladie Covid-19

Concernant le problème du dépistage, le lecteur peut se reporter à l’article du mois de décembre 2020 sur « les maladies infectieuses en milieu professionnel ». Concernant les aspects cliniques, ils ont été développés dans l’article du mois de septembre 2020.
La Covid-19 est dans sa forme typique une maladie respiratoire aiguë à type de pneumonie, mais elle peut toucher de nombreux autres organes. Il est encore trop tôt pour avoir une idée de l’importance des différentes complications.
On parle de « Covid long », pas forcément après une forme grave, lorsque persistent au delà d’un mois des symptômes tels qu’essoufflement, maux de tête, fatigue, troubles de la concentration et de la mémoire, perte du goût et de l’odorat… Ce terme a tendance à supplanter le terme de « syndrome post-Covid » utilisé auparavant.

Il n’y a pas pour le moment de traitement médicamenteux spécifique contre le Covid-19 sachant le peu d’intérêt pour ce type de recherche nettement moins rentable à long terme que les recherches sur les vaccins.

Les traitements restent donc symptomatiques sachant que les formes graves sont actuellement mieux prises en compte avec la mise en œuvre de corticoïdes et d’anticoagulants et un moindre recours à l’intubation permettant de réduire la mortalité.

La vaccination : parade majeure contre le Covid-19 ?

Les diverses mesures de prévention pour réduire la circulation du virus, tels que les gestes barrières (port du masque notamment), les différentes mesures de confinement total ou partiel, la prise en charge des clusters, s’avèrent incapables d’éradiquer le virus.

L’espoir est mis sur la vaccination de masse permettant, d’une part d’arriver à une immunité collective et d’autre part, à réduire le nombre de formes graves et de décès notamment chez les populations à risque (personnes âgées et personnes avec des co-morbidités).

Le principe de la vaccination consiste à présenter à l’organisme que l’on veut protéger un micro-organisme modifié, inoffensif ou une partie de ce dernier, entraînant la mise en branle du système de défense immunitaire, avec notamment la production d’anticorps qui pourront par la suite neutraliser l’agent infectieux indésirable.
Le premier vaccin humain a été mis au point par Pasteur en 1880, contre la rage, donnant lieu par la suite à la mise au point d’un certain nombre de vaccins aussi bien contre les bactéries que contre les virus.

Ces vaccins dits « classiques » sont de deux ordres :

  • Les vaccins vivants atténués, créant une infection à minima avec une protection immunitaire durable. Le BCG est un bel exemple.
  • Les vaccins inactivés, les plus utilisés, contenant soit un fragment de l’agent infectieux (vaccin contre l’hépatite B), soit l’agent infectieux en entier (vaccin contre la coqueluche).

Sont ajoutés des adjuvants (sels d’aluminium) pour une plus grande efficacité immunitaire. L’utilisation de ces adjuvants ont posé en son temps quelques problèmes.

♦ L’essor de la biologie moléculaire a permis la mise au point de vaccins de « nouvelle génération », et notamment de 3 types :

  • Les vaccins à vecteur viral : on utilise un autres virus inoffensif (adénovirus) auquel on insère la partie génétique significative du coronavirus, notamment le gène de la protéine S.
  • Les vaccins à protéines qui consistent en une injection de protéines du coronavirus et notamment la protéine S.
  • Les vaccins à matériel génétique : on injecte une partie du matériel génétique significatif. Les vaccins à ARN messager en sont un exemple.

Plusieurs centaines de projets de vaccins sont à l’étude concernant les 5 types de vaccins. Plusieurs dizaines sont en voie de finalisation et quelques uns seulement, sont actuellement sur le marché après vérification, dans le cadre d’une procédure à 3 phases, de leur efficacité et leur innocuité.

♦ Les vaccins actuellement opérationnels en France sont :

  • Pfizer-BioNtech : vaccin à matériel génétique. Les brins d’ARM messager codant pour la protéine S sont contenus dans des nanoparticules lipidiques. Efficacité à 95 %, mais à conserver à moins 70 °.
  • Moderna : du même type que le précédent avec une efficacité identique, à conserver à moins 20 °.
  • AstraZeneca : vaccin à vecteur viral, d’efficacité moindre (79 %) mais conservable entre 2 et 8 °.
  • Johnson&Johnson (Janssen), vaccin également à vecteur viral, qui sera bientôt disponible en France et ne nécessitera qu’une seule injection alors que les vaccins précédents nécessitent 2 injections avec un intervalle entre les deux.

D’après les données venant de pays qui ont vacciné massivement très tôt (Israel, Royaume Uni , Etats-Unis …) la vaccination apparaît efficace, d’une part sur la circulation du virus et d’autre part, sur la survenue de formes graves.
On ne connaît pas bien, pour le moment, la durée de l’immunité que la vaccination confère. Se pose également le problème de l’efficacité des vaccins actuels sur les différents variants, sachant qu’il est possible de modifier assez rapidement la composition des vaccins, comme c’est le cas pour la grippe, où le vaccin est différent chaque année en fonction de la circulation des souches.
Le débat qu’il y a actuellement sur les complications de la vaccination sont à restituer dans le cadre de la notion « bénéfice/risque », tout en sachant que la surveillance des effets secondaires par une procédure de pharmacovigilance doit permettre de faire la part des choses.

La dynamique de la pandémie

On dénombre à ce jour 2 millions 650 milles décès dans le monde entier dus au Covid-19 (pour 119 millions de cas) et plus de 90 000 décès en France (pour 4 millions de cas).

Le taux de mortalité rapporté à un million d’habitants permet la comparaison avec les différents pays selon l’importance de leur population.
La Belgique est en tête (1 725) tandis que la France se situe en 11ème position avec 1 008 morts.

Le taux de létalité donne également une idée du degré de gravité de la maladie. C’est le nombre de décès rapporté au nombre de cas détectés (lié à la pratique du dépistage). Il est de 0,7 % en France.

Un indicateur qui prévaut en France dans la prise de décisions pour des mesures plus ou moins restrictives. C’est la capacité du système hospitalier à faire face, sachant que l’hôpital public est mal en point et ce depuis longtemps, bien avant la crise du Covid.
Actuellement, le nombre de malades du Covid en réanimation dépasse les 4 000, avec de fortes disparités selon les régions. Il était à plus de 7 000 lors de la première vague.

Le calcul du taux d’incidence est de manipulation facile pour avoir une idée sur la circulation du virus. C’est le nombre de nouveaux cas par rapport à 100 000 habitants. Il est actuellement en France de 266, mais il existe également de fortes disparités selon les lieux, incitant à penser l’action en terme régional et local.

La reconnaissance en maladie professionnelle

En complément de l’article de septembre 2020, il convient de rappeler qu’il existe maintenant le tableau n°100 (disponible sur internet) prenant en compte l’affection respiratoire aiguë liée au Covid, et qui concerne les soignants au sens large dans une longue liste limitative.

Ne sont pris en compte que les formes ayant nécessité une oxygénothérapie ou ayant entraîné le décès.
Pour les autres (soignants sans oxygénothérapie et les autres professions), il existe une procédure complémentaire nécessitant d’établir un lien direct et essentiel avec le travail. Le dossier est soumis pour avis à un Comité de Reconnaissance des Maladies Professionnelles constitué de 2 membres. Mais, il existe un verrou très restrictif d’accès à cette procédure, la victime devant justifier pour les séquelles d’un taux d’IPP prévisible d’au moins 25 %.
D’après les statistiques en notre possession, sur plus de 15 000 déclarations (soit en AT, soit en MP), on compte à ce jour un peu plus d’une centaine de reconnaissances, confirmant le peu de prise en compte des maladies professionnelles en France.
Il convient de rappeler qu’il existe, à l’UTI Alsace, un dispositif d’aide, aux syndicats pour leurs adhérents victimes, avec des permanences médico-légales utilisant les compétences d’un médecin référent.

Dr. L. PRIVET

TÉLÉCHARGEMENT DE FICHIERS