« Il faut traiter les vrais sujets » ( L'alsace - Divers / Sa. 7 Septembre 2019 )

Publié le 18/09/2019

Le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, a rencontré ce vendredi les salariés de la centrale nucléaire de Fessenheim, avant de débattre, à Kintzheim, avec les délégués alsaciens de la branche chimie-énergie. 

 

L'alsaceLaurent Berger, vous avez été reçu jeudi par le Premier ministre pour évoquer la réforme des retraites : quelle position avez-vous fait valoir ?

 

Pour la CFDT, le critère essentiel de cette réforme est celui de la justice sociale. Si on veut que la réforme soit acceptable, il faut abandonner une approche purement budgétaire : le système des retraites n'est pas en difficulté sur ce plan comme il a pu l'être dans les décennies précédentes. Nous avons été en désaccord avec d'autres réformes, notamment en 2010. Mais aujourd'hui, le président de la République annonce une réforme qualitative... On dit chiche !

Quelle est, pour la CFDT, la ligne à ne pas franchir ?
 

C'est l'augmentation de l'âge de départ, l'instauration d'un âge pivot à 64 ans. Le rapport Delevoye propose des mesures avec lesquelles nous sommes d'accord, comme la majoration dès le premier enfant, au lieu de trois actuellement. Mais il y a d'autres points qui ne font pas partie des propositions, ou insuffisamment : la pénibilité, les retraites progressives, on ne dit pas grand-chose sur les compensations pour les enseignants, pour les aides-soignants... On veut discuter de ces sujets-là et on dit au gouvernement : prenez le temps ! Il n'y a pas d'urgence. Je constate que le match n'a pas encore eu lieu... Il n'a même pas encore vraiment commencé, mais certains commentent déjà le résultat !

 

Vous considérez que le dossier des retraites éclipse trop d'autres sujets...
 

Avec d'autres signataires du « Pacte du pouvoir de vivre », on se bat en ce moment pour qu'une augmentation du RSA soit inscrite dans le projet de loi de finances pour 2020. C'est bigrement important ! Il y a aussi la question du travail : pourquoi les gens s'intéressent tellement à la retraite ? Parce qu'ils en ont marre du boulot ! Il faut parler de la qualité de vie au travail. Le patronat dit que les gens doivent travailler plus longtemps, mais la moitié des gens qui arrivent à la retraite n'avaient déjà plus d'emploi : ça n'est pas cohérent.

Pour une augmentation du RSA
 

Un autre sujet est très important pour nous en cette rentrée : c'est la mise en place des conseils sociaux et économiques (CSE). La ministre du Travail nous a promis plus de dialogue social grâce à cette instance unique : mais en Alsace, comme partout où je vais chaque semaine, je constate que nombre de CSE se mettent en place sans accord, c'est-à-dire sur la base du minimum légal, avec moins de dialogue social.

Vous venez de publier « Syndiquez-vous ! » : ce livre-plaidoyer signifie-t-il que votre progression aux élections professionnelles ne s'accompagne pas d'une hausse du nombre d'adhérents ?
 

Oui, nos adhésions stagnent. Nos résultats électoraux montrent une adhésion à nos idées, mais il ne se traduit pas par un engagement. On a un problème d'image, on a besoin de faire la démonstration de notre utilité. Il faut prendre en compte l'individualisation de la société. Nous, nous voulons recréer du collectif. L'adhésion est devenue aussi plus volatile, il faudra repenser la question des cotisations.

Mais je ne crois pas que ce soit le frein n° 1. Le frein, c'est plutôt de se demander : est-ce que je vais garder ma liberté de pensée ? Est-ce que je pourrai m'engager à géométrie variable dans différentes actions ? Est-ce qu'on s'occupera aussi des questions qui m'intéressent ? La réponse, c'est à chaque fois oui. Nous sommes ouverts. La seule chose intangible, ce sont nos valeurs.