Laurent Berger, de passage à la Foire de Châlons : « Nous aurons besoin de davantage de solidarité » (L'Union / 6 septembre 2022)

Publié le 13/09/2022

De passage à la Foire de Châlons, Laurent Berger, le secrétaire général de la CFDT, évoque la question du pouvoir d’achat, source majeure de conflictualité dans les entreprises, et les risques liés à l’inflation.

Comment jugez-vous le climat social actuel marqué par l’inflation ?

Cette rentrée est empreinte d’inquiétudes et d’incertitudes. D’abord, nous devons faire face à toutes les conséquences économiques et sociales de la guerre en Ukraine. En vue des mois à venir, la question des salaires, de la hausse des prix de l’énergie et de pouvoir vivre dignement se pose pour beaucoup de citoyens. .../... Mon message est clair : il faut traiter ces enjeux salariaux, et de difficulté d’emploi pour certains, plutôt que d’agiter le chiffon rouge des retraites. Le gouvernement le sait, je l’ai répété : il y aurait un mouvement social dur si le sujet des retraites revenait.

L’État joue-t-il pleinement son rôle sur la question du pouvoir d’achat ?

Je considère qu’il peut encore agir .../... Par exemple, il pourrait proposer une quantité d’énergie à prix réduit par ménage, en tenant compte de la composition du ménage, et la suite à coût plus important. Les ménages qui sont déjà en précarité énergétique vont l’être encore plus .../... tout ce qui relève de la surconsommation des plus aisés doit être mis à des tarifs plus importants.

Faut-il taxer davantage les « superprofits » ?

.../... Lundi, le président Macron s’est dit en faveur d’une décision européenne et, à défaut, d’une décision prise à l’échelle française. Au-delà des « superprofits », les plus riches, et ceux qui n’ont pas du tout subi les conséquences de la crise, doivent développer des mécanismes de solidarité. .../...

Au-delà de la conjoncture actuelle, nous, à la CFDT, considérons que la fiscalité n’est pas juste dans ce pays. Il faudrait une contribution plus forte des hauts revenus et taxer les revenus du capital au même niveau que ceux du travail.

En matière de salaires, près de 140 branches professionnelles ont des minima sociaux inférieurs au smic...

Oui, 143 branches précisément. C’est inadmissible. Certaines branches ont jusqu’à huit échelons sous le smic... Ce qu’on dit au gouvernement, c’est : vous ne réglerez pas seul le problème des salaires mais conditionnez les allégements de cotisations des entreprises au fait que les branches professionnelles soient en conformité avec le smic. Pour celles qui ne le sont pas, baissez les allégements des cotisations afin que des entreprises ne bénéficient pas d’un effet d’aubaine.

Alors que la CGT appelle à une journée nationale d’action professionnelle le 29 septembre, la CFDT a annoncé qu’elle ne pensait pas y participer. Pourquoi ?

La CFDT est très mobilisée sur les questions des salaires et des conditions de travail. Mais qui peut faire croire qu’une augmentation générale des salaires se gagnera avec une mobilisation interprofessionnelle ? Il ne faut pas leurrer les salariés. Qu’attendent-ils ? Qu’on règle leurs problèmes concrets, et c’est ce que nous faisons.

Nous mesurons la conflictualité par notre caisse de grève, qui aide nos adhérents lorsqu’ils cessent le travail à l’occasion d’un différend avec leur employeur. Au premier semestre de cette année, elle a été sollicitée comme jamais depuis quinze ans. .../.... Cette manifestation peut servir à relayer des mécontentements mais pas, à mon sens, à trouver une solution.